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Description
Sujets
Informations
Publié par | Québec Amérique |
Date de parution | 22 janvier 2013 |
Nombre de lectures | 0 |
EAN13 | 9782764419731 |
Langue | Français |
Informations légales : prix de location à la page 0,0350€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
Collection dirigée par Anne-Marie Villeneuve
De la même auteure chez Québec Amérique jeunesse
Une famille et demie , coll. Titan, 2001.
Des vacances à temps partiel , coll. Titan, 2003.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Poudrier, Élyse
Un automne entre parenthèses
(Titan jeunesse ; 65)
Suite de : Des vacances à temps partiel.
9782764419731
I. Titre. II. Collection.
PS8581.O836A97 2006 jC843’.6 C2005-942075-8
PS9581.O836A97 2006
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIÉ) pour nos activités d’édition.
Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC.
Les Éditions Québec Amérique bénéficient du programme de subvention globale du Conseil des Arts du Canada. Elles tiennent également à remercier la SODEC pour son appui financier.
Québec Amérique 329, rue de la Commune Ouest, 3 e étage Montréal (Québec) H2Y 2E1 Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010
Dépôt légal : 1 er trimestre 2006 Bibliothèque nationale du Québec Bibliothèque nationale du Canada
Révision linguistique : Chantale Landry Mise en pages : Andréa Joseph [PageXpress] Conception graphique: Karine Raymond Réimpression: février 2008
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés
© 2006 Éditions Québec Amérique inc.
www.quebec-amerique.com
Imprimé au Canada
Sommaire
Page de titre Page de Copyright Dedicace Epigraphe Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4 Chapitre 5 Chapitre 6 Chapitre 7 Chapitre 8 Chapitre 9 Chapitre 10 Chapitre 11 Chapitre 12 Chapitre 13 Chapitre 14 Chapitre 15 Chapitre 16 Chapitre 17 Chapitre 18 Chapitre 19 Chapitre 20 Chapitre 21 Un automne entre parenthèses
À Solveil, Edouard, Danaée et Mathias
« Tout ce qui arrive une fois peut ne plus jamais arriver. Mais tout ce qui arrive deux fois arrivera certainement une troisième fois. »
Paulo Coelho L’Alchimiste
Chapitre 1
— Ohé !
Complètement immobile et aux aguets, j’écoute l’écho de ma voix rebondir d’un mur à l’autre du salon avec un petit sourire innocent. C’est fou comme deux petites syllabes lancées ici et là dans un logement vide trouvent encore le moyen d’amuser un gars de presque vingt ans.
— Il y a quelqu’un ?
J’aurais été quelque peu troublé si une réponse m’était parvenue. Ma question demeure heureusement en suspens dans l’espace, ce qui me laisse croire qu’aucun spectre n’a fait de mon nouvel appartement sa résidence secondaire.
Je m’approche de la fenêtre, l’ouvre et contemple la vie mouvementée qui se déroule sous mes yeux. La rue est bondée de piétons, cyclistes et automobilistes qui tâchent de se partager un minuscule bout d’asphalte sans se piler sur les pieds. Des gens entrent les mains vides dans ce qui deviendra sous peu ma future épicerie et je suppose qu’ils en sortiront plus tard les bras chargés de vivres pour une semaine entière. Deux hommes d’affaires en veston, cravate et souliers cirés marchent côte à côte à une vitesse étonnante et discutent probablement de leur prochaine grosse transaction en engouffrant leur sous-marin entre deux énoncés. Le vieux voisin d’en face se berce sur son balcon et semble prendre un plaisir aussi grand que le mien à les espionner. Qui sait s’il n’y a pas des millions de dollars en jeu ? Un commerçant refait sa vitrine de vêtements pour enfants, un chien errant renifle les poubelles du Roi du hamburger et Bajou tente de calmer ma nouvelle voisine d’en bas qui, téléphone en main, menace d’appeler les policiers si nous ne déplaçons pas immédiatement notre camion de déménagement de sa place de stationnement. Charmant accueil…
— Qu’est-ce que tu fous ?
Je me retourne en sursaut vers le vestibule. Anouk fait son apparition, en poussant la porte du bout du pied. Son visage est rendu tout rouge par l’effort fourni lors de l’ascension des deux étages, en plus de porter ma chaîne stéréo dans ses bras. Je me précipite vers elle avant que ses muscles ne la trahissent et qu’elle laisse tomber son précieux colis. Pour tout remerciement, Anouk grogne un « il n’était pas trop tôt » qui m’incite à tourner la langue sept fois dans ma bouche. Elle sacrifie tout de même sa dernière journée de vacances pour venir m’aider à emménager. Si je veux encore abuser de sa bonne volonté, vaut mieux ne pas répliquer.
Pendant que je cherche un endroit où déposer mon paquet, Anouk examine le mur de mon salon tout en reprenant son souffle. La tête penchée sur le côté, les mains sur les hanches, elle l’étudie consciencieusement de haut en bas, en grimaçant.
— C’est quoi, cette couleur-là ? Vieux rouille ?
Je lui envoie mon regard le plus assassin avant de déposer ma chaîne stéréo sous la fenêtre du salon. Pourquoi les filles s’occupent-elles principalement de détails tels que celui-ci ? « Vieux rouille » ou pas, je ne passerai pas mon temps dans cette pièce à analyser de près les pigments de peinture au latex qui recouvrent le mur. Pas débile à ce point-là.
Je retourne à mon poste d’observation pour y surveiller l’issue de la polémique entre Bajou et la locataire d’en bas. Si j’en juge par le non verbal de mon ami qui, poings serrés, se mord l’intérieur des joues en fixant ma voisine d’un regard menaçant, les négociations sont loin d’être terminées !
— Si elle est aussi entêtée que lui, ils en seront encore au même point demain matin.
Anouk s’est désintéressée de ma déco et s’amuse maintenant à ouvrir et à refermer systématiquement toutes les boîtes qu’elle rencontre sur son passage.
— Tu cherches un objet en particulier ?
— Les verres.
Je lui indique une boîte sur le comptoir de la cuisine.
— Je crois qu’il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans sa tête.
Anouk joint le geste à la parole en tournant son index contre sa tempe. En effet ! Quelle femme oserait sortir sur son perron accoutrée d’un ensemble pareil ? N’avait-on pas voté une loi, au début des années 1990, pour interdire la fabrication de vêtements roses à pois blancs ?
— Les policiers ne se déplaceront jamais pour une histoire semblable. Franchement ! Ils ont d’autres chats à fouetter.
Anouk me rejoint et s’assoit sur le bord de la fenêtre, se permettant une petite pause. Son verre d’eau tient en équilibre précaire sur son genou. Je la mets en garde contre cette prédisposition des gobelets à se renverser accidentellement sur la tête de ceux qui nous énervent. Elle me sourit, candide, et je sais que madame ma nouvelle voisine n’a pas à craindre pour ses beaux habits.
— Tu lui donnes combien ? Cinquante ? Soixante ans ?
— Non, au moins soixante-dix.
— Tu crois qu’une femme de son âge peut encore posséder une voiture ?
— Posséder, oui. Conduire, c’est une autre histoire.
Anouk semble réfléchir à la situation.
— Alors, disons qu’elle ne conduit pas et qu’elle ne possède pas de voiture. Peux-tu m’expliquer la raison pour laquelle Bajou et elle s’obstinent depuis tout à l’heure ?
— Je crois que ce n’est plus seulement une histoire entre Bajou et la voisine. Regarde…
Lydia, qui continuait jusqu’à présent de décharger le camion en feignant d’ignorer ma voisine, s’est mise à négliger sa tâche pour mieux prendre part aux pourparlers se déroulant dans son dos. À tel point que Bajou, visiblement désemparé d’être ainsi exclu de la discussion, tente maintenant de modérer les propos de sa blonde, qui deviennent de plus en plus pernicieux.
— On est peut-être mieux de descendre…
Anouk et moi, d’un regard entendu, nous précipitons dans la cage d’escalier pour porter secours à Bajou, puisque Lydia ne semble manifestement pas en avoir besoin.
Sitôt arrivé sur les lieux du drame, je tente de reprendre la situation en main. C’est tout de même moi le nouveau locataire.
— O.K., qu’est-ce qui se passe ic… ?
— NON, MAIS QUELLE GOURDE ! Je n’arrive pas à y croire ! Tout ça pour une putain de place de parking inoccupée ? Mais vous êtes complètement timbrée ou quoi ? Vous voulez appeler les flics pour ÇA ?
Le problème avec les Français, c’est qu’ils ne savent pas quand s’arrêter.
— Euh… Lydia, ce n’est pas nécessaire de…
— Mam’zelle, vous saurez que ce n’est pas parce qu’on est des personnes du troisième âge qu’on est nécessairement « timbrés », comme vous dites. Dans le bail que j’ai signé, c’est indiqué que j’ai droit à une place de stationnement et je tiens à ce que ce droit soit respecté.
— MAIS POUR Y GARER QUOI ? BORDEL DE MERDE ! VOTRE BALAI, PEUT-ÊTRE ? Espèce de sorcière !
— Lyd…
— Vous les jeunes, vous ne respectez plus la propriété d’autrui. Vous vous croyez tout permis. Vous pensez peut-être qu’on devrait se plier en quatre pour répondre au moindre de vos besoins ? Dans mon temps, c’était à moi de me débrouiller. Et si j’avais le culot de demander quoi que ce soit à mon pôvre père, j’avais droit à une taloche derrière la tête…
Lydia jette un regard à la ronde, dépassée par ce qu’elle entend, avant de hurler, au bord de la crise d’hystérie :
— NON, MAIS ON S’EN FOUT DE VOTRE PÈRE ! IL N’EST MÊME PAS EN CAUSE !!!
Jamais je n’aurais cru qu’autant de fureur puisse émaner d’une personne si menue. Je me sens quelque peu inutile, voire même dérouté par la tournure des événements. Je m’encourage cependant en me disant qu’une des deux finira bien par se calmer… ou par faire une crise d’hyperventilation. Je rejoins donc Anouk qui se ronge l’ongle du pouce et Bajou qui, ébahi, ne quitte pas des yeux sa bien-aimée.
Je m’adosse à mon tour contre le camion, les bras croisés, en me mordant l’intérieur des joues pour ne pas éclater de rire. Je vois déjà les grands titres dans le journal, demain matin : Deux femmes en viennent aux poings pour une place de stationnement ou Une Française retournée dans son pays pour manque de civisme envers une